Photo :
James Corbin

Emprunter le chemin de l’excellence pour surmonter la crise

Déc 18 by Frédéric Baland – Manager at EDGE Consulting

2020 est une année qui restera dans la mémoire collective comme une année où le monde a fait face à un changement sans précédent. Au premier trimestre, une pandémie débarque sur le vieux continent, au second, le monde est à l’arrêt, et au troisième, l’économie mondiale est à bout de souffle.

Ce quatrième trimestre renforce encore ce constat qui est sans appel: pour bon nombre d’entreprises, le résultat de leur équation économique vise, en priorité, la survie quand d’autre ont pu minimiser les impacts de cette pandémie voire en tirer profit.

Quels sont les challenges qui découlent de ce contexte particulier ?

La santé et la sécurité avant toute chose

Parmi les priorités qu’une organisation doit gérer dans la traversée de cette crise, la garantie de la sécurité et de la santé de l’ensemble des acteurs de son écosystème est devenue la priorité absolue. 

Dans le secteur de la mobilité, le COVID-19 a placé la SNCB face à des contraintes gigantesques. L’opérateur ferroviaire, transportant en temps normal plus de 900.000 passagers par jour, s’est retrouvé face au défi de prendre des mesures drastiques sur l’ensemble de ses opérations (3.700 trains par jour) pour garantir la sécurité des passagers, du personnel et de ses fournisseurs. Une réponse insuffisante, trop lente ou inadaptée aurait causé à coup sûr des dommages sanitaires critiques, un important déficit de crédibilité et/ou un arrêt ferme de l’activité. L’opérateur ferroviaire a fait appel à Philippe Dubois (directeur chez edge et co-rédacteur du présent document) pour prendre en charge le PMO coordonnant la réponse à la crise. Ce programme a permis de maximiser l’offre de trains (et donc de faciliter la distanciation sociale) en mai, seulement deux mois après les prémices de la crise sanitaire.

Se transformer, s’adapter ou disparaitre

Les changements structurels introduits par l’arrivée de la pandémie ont poussé les entreprises à remettre en question les fondements mêmes de leur business model. Que cela se fasse au travers de légères adaptations ou de « pivots » à 180°, ces transformations ont été d’une nécessité absolue, d’une part pour continuer à garantir le meilleur service aux clients et d’autre part pour survivre, tout simplement.

Un bel exemple provient d’Afrique du Sud. La chaine de retail Woolworths, spécialisée initialement dans les articles ménagers, la mode et les produits de beauté, a décidé d’introduire deux changements majeurs dans son business model : l’élargissement de son offre avec des produits alimentaires de première nécessité, et, la mise en place d’un système de Click & Collect pour limiter les contacts physiques entre les clients et les employés de l’entreprise. Ce virage pris par l’entreprise a non seulement permis de tenir compte des contraintes strictes imposées au secteur mais également d’accélérer l’utilisation de sa plateforme e-commerce dont la croissance était jusqu’alors atone.  

La résilience en point de mire

Sans pour autant remettre en cause son business model, il est aussi vital pour une entreprise d’inclure, dans l’ensemble de sa Supply Chain, des mécanismes lui permettant d’être la plus flexible et la plus résiliente possible pour s’adapter aux nouvelles contraintes d’exploitation.   

Face à l’explosion du commerce en ligne, bpost a dû faire face à une augmentation très importante de la demande d’envoi de colis. Afin de garantir l’absorption de cette demande, minimiser l’impact sur le service de livraison à J+1 et réduire les risques de contamination, les processus de traitement de colis, les systèmes IT et l’organisation du personnel des centres de tri et de distribution ont dû être rapidement adaptés.

Les défis qui se dressent devant nous sont donc de taille :

  • Comment transformer l’environnement de travail pour assurer la sécurité et la santé de tous ?
  • Comment s’adapter aux comportements des clients et fournir de la valeur en ces temps de crise ?
  • Comment garantir la continuité de ses services et optimiser sa chaine de valeur en conséquence ?

L’Excellence Opérationnelle est la capacité d’une entreprise à créer toujours plus de valeur pour ses clients, ses collaborateurs et ses partenaires, afin d’améliorer durablement sa compétitivité. Elle s’appuie sur 6 principes fondamentaux.

SCHEMA

01 Combler le client

La métamorphose brusque et inédite du contexte actuel donne l’opportunité aux entreprises d’affuter davantage leurs armes dans la quête de la satisfaction permanente du client. Plus qu’une priorité, le client devient un repère, un cap. De cette façon, il sera possible aux entreprises de mettre en place des mécanismes lui permettant de percevoir l’ensemble des signaux que le client émet, consciemment ou pas, afin de remettre en question leurs propositions de valeur.

image04

L’un des objectifs de méthodes comme le Lean Start-up ou le Design Thinking est de pouvoir sentir cette demande latente et anticiper les désirs des clients. Ces deux approches mettent en avant la conception d’un MVP (Minimum Viable Product), mis à disposition du client pour le tester, collecter le plus rapidement possible son feedback, de redévelopper une version améliorée de ce MVP, lui rendre à nouveau disponible pour un second test, et ainsi de suite. Chez edge, nous appliquons les méthodes de design thinking à l’ensemble de nos projets, en partenariat de confiance avec 66 origin, un lab d’innovation spécialisé dans le développement de produits & services innovants.

02 Améliorer continuellement la performance

La valeur apportée ne se défini pas uniquement comme la valeur du produit fini telle qu’elle est perçue par l’acheteur final et de lui adjoindre des services supplémentaires. Il s’agit également de la manière de le concevoir et de le distribuer, le tout au plus juste coût et en évitant les gaspillages. 

Ces dernières années, bon nombre de dirigeants d’entreprise ont diffusés les principes du Lean dans leur organisation. En plus d’être le vecteur de réduction des coûts, le Lean permet également d’améliorer la qualité, de stabiliser les processus, d’éradiquer les improvisations dans l’urgence et de préparer le terrain pour une amélioration continue de la performance.

Parmi la très longue liste d’outils proposé par le Lean, la méthode Kaizen, se révèle particulièrement précieuse. Les ateliers Kaizen s’axent essentiellement autour d’outils de résolution de problèmes. Une équipe pluridisciplinaire est constituée et recherche les sources d’inefficacité et propose des améliorations rapides et faciles à mettre en œuvre.

Chez l’un de nos clients, un opérateur télécom international, nous avons organisé des ateliers Kaizen – en complément d’autres outils du Lean Six Sigma – axés sur la revue des processus existants et l’identification de pistes d’amélioration pour la construction de processus futurs. Ainsi, nous avons identifié des quick wins actionnables, ayant contribué à l’atteinte des objectifs de croissance sans engagement de budget supplémentaire.

Enfin, à cette vision de progrès permanent vient également s’ajouter l’organisation managériale, plus simple, permettant de fluidifier les échanges, motiver les équipes, rendre les équipes toujours plus agiles et plus proche des clients. L’esprit de simplification est l’une des essences de l’Excellence opérationnelle, centrée sur le juste nécessaire. 

03 Aligner l’entreprise sur une vision partagée de la performance

Pour qu’une vision circule dans toute l’organisation, elle doit être communiquée, sans altération de message que ce soit dans les mots, dans les attitudes managériales ou les politiques de l’entreprise. Ainsi, chaque collaborateur, quel que soit son niveau, aura l’opportunité de s’interroger sur ce qu’il peut entreprendre pour contribuer à la performance de l’entreprise. 

En période de mutation, comme celle dans laquelle nous nous trouvons, le risque de démobilisation des salariés est grand. Comment demander à son personnel de modifier sa façon de travailler et de se dépasser s’il ne perçoit pas la raison pour laquelle il le fait ? L’adhésion et l’engagement de tous au projet commun est une condition sine qua non à son succès et est de la responsabilité de chaque leader.

04 Placer l’humain au centre du dispositif

Selon une étude Gallup de 2017, qui sonde régulièrement les employés belges, 73% d’entre eux ne se disent pas engagés dans leur travail. Pire, 17% se déclarent « complètement désengagés », c’est-à-dire que non seulement ils sont malheureux au travail mais ils véhiculent leur démotivation à leurs collègues engagés. En d’autres termes, seul un salarié sur dix aiderait l’entreprise à avancer. 

Ce qu’il a manqué à ces employés ? De sentir une direction, une vision partagée. Ils ont été frustrés de ne pas se sentir utile dans leur organisation. Et un besoin fondamental n’a pas été comblé : la reconnaissance et la confiance placée dans leurs compétences. 

Il est possible d’aisément estimer le niveau de motivation de vos salariés en leur posant ces trois questions :

  • Vos initiatives sont-elles prises en compte ?
  • Avez-vous l’impression que vos opinions sont écoutées ?
  • Votre supérieur hiérarchique veille-t-il à votre développement personnel ?

Une majorité de réponses négatives à l’une de ces questions vous donne un signal fort qu’il est temps d’agir si vous souhaitez obtenir le meilleur de vos collaborateurs.

05 Mobiliser l’ensemble des parties prenantes, en amont et en aval de l’entreprise

Comme le dit l’adage : une chaîne a la force de son maillon le plus faible. Pour atteindre un résultat optimal, les objectifs de l’excellence opérationnelle doivent être partagés par l’ensemble des parties prenantes à l’écosystème de l’entreprise. L’origine des inefficacités est identifiée par un examen du système opérationnel dans sa totalité en remontrant tout le flux, des clients jusqu’aux fournisseurs en passant par l’ensemble des processus de conception. 

Cependant, l’absence de convictions des partenaires ne doit pas constituer un frein au lancement d’une telle initiative. La mise en avant et le partage des résultats obtenus seront autant d’éléments de conviction pour obtenir leur adhésion et leur participation active dans la démarche.

06 Digitaliser pour accélérer

La transformation digitale révolutionne la relation avec le client et l’écosystème de l’entreprise, créé de nouveaux business models, mais change également les flux de valeur internes ou externes. L’ère digitale appelle désormais à mélanger les méthodes d’amélioration continue avec les leviers digitaux d’aujourd’hui. 

Les technologies mobiles, les réseaux sociaux, l’intelligence artificielle, les objets connectés et le big data sont des exemples de la nouvelle génération de technologies qui ont fondamentalement changé le degré d’excellence opérationnelle pouvant être atteint dans les entreprises modernes. 

Le gène de l’Excellence Opérationnelle existe dans toutes les organisations, de la start-up au mastodonte mondialisé, dans la transformation de biens ou dans les services, dans le public ou dans le privé. Il suffit qu’il soit activé.

Si l’Excellence Opérationnelle est accessible à tous, cela n’est pas pour autant une loterie, où l’on gagne à tous les coups. Elle assure toutefois la meilleure préparation pour se présenter sur la ligne de départ avec les plus grandes chances de victoire.

Pour qu’elle procure une performance durable, deux éléments importants sont à conserver dans un coin de la tête :

  • L’impulsion doit provenir du sommet de l’entreprise. Les dirigeants doivent être convaincus et porter la diffusion de l’Excellence Opérationnelle à bras le corps de manière à impliquer l’ensemble de l’organisation.
  • Sa mise en œuvre peut prendre du temps, c’est aussi pour cela que l’impulsion doit venir du haut, de la part d’un dirigeant qui s’engage dans la durée. 

Enfin, il faut accepter d’expérimenter, de persévérer jusqu’à ce que la réussite soit au rendez-vous. Le parcours sera probablement semé d’embuches et d’erreurs, aussi. Il faut les admettre, les comprendre et adapter, en permanence. Sauf évidemment si ce sont toujours les mêmes erreurs qui sont reproduites. 

frederic

by Frédéric Baland